Têtu

Edouard Collin, un acteur sauvage

Edouard Collin, tout juste 18 ans, est un acteur à suivre. Après avoir incarné un jeune gay au cinéma dans « Crustacés et Coquillages », il est au théâtre dans « Un Cœur Sauvage », où il interprète un adolescent qui découvre son homosexualité.

Pouvez-vous nous parler de votre rôle dans Un Cœur Sauvage.
C’est l’histoire de Mathan, un jeune qui ne va pas très bien. Il ne comprend pas pourquoi. Quand sa meilleure amie lui présente son nouveau petit copain, il se rend compte que c’est parce qu’il aime les garçons. Il va tomber amoureux du copain de son amie. Au début, il va le refuser. Puis il va s’accepter, au fur et à mesure de la pièce. Et il va finir par en parler à ce garçon. Pour la suite, vous verrez bien…

Qu’est-ce –qui vous a amené à jouer ce rôle ?
J’ai contacté l’auteur, Christophe Botti, après avoir vu Un Cœur de Père, l’une de ses pièces. Dans celle-ci, un rôle m’avait beaucoup touché. Le personnage était le même que celui que je joue maintenant, mais plus âgé, il avait 25 ans. J’avais dit à l’auteur que, si la pièce était reprise, je voulais à tout prix passer l’audition. Il m’a répondu. Aujourd’hui, Christophe est même devenu l’un de mes meilleurs amis. Un jour, il m’a dit qu’il avait trouvé la bonne personne pour ce rôle, dans une version plus jeune. Et il a écrit Un Cœur Sauvage. Après Crustacés et Coquillages, d’Olivier Ducastel et Jacques Martineau, je ne voulais plus trop jouer de rôle dont la principale caractéristique est d’être homosexuel. En même temps, comme Christophe avait écrit la pièce, je n’allais pas dire non. Quand quelqu’un écrit une pièce pour vous, alors que vous n’avez que 18 ans, c’est beau.

Ce rôle était-il lié à des chose que vous aviez vécues ou ressenties ?
Non, ce n’était pas pour ça. C’était parce qu’il était écrit de sorte que je pouvais le jouer : très impulsif, très sincère, très sensible.

Avez-vous eu des échos de la part de jeunes homos après votre rôle dans Crustacés et Coquillages ?
Oui, pas mal de gens m’ont écrit. D’ailleurs, je leur ai répondu. Ils m’ont parlé du film, de ce qu’ils en pensaient, de la manière dont je le jouais. C’était très sympa.

Pas de témoignages ?
Non. J’ai eu beaucoup d’invitations à dîner ou pour aller boire un verre, mais pas de témoignages. Cela viendra peut-être avec cette pièce, je ne sais pas.

Avant de faire cette interview, vous m’avez dit au téléphone que vous ne vouliez pas être catalogué comme un jeune gay. Pourquoi ?
Ce n’est pas parce que je n’en ai pas envie. Pour moi, jouer un gay ou un hétéro, c’est la même chose. Là, je viens de faire deux films où je joue des rôles d’hétéros. C’est le système du cinéma français : quand vous commencez à jouer ces rôles-là, on ne vous propose plus que ça. Et je ne veux pas être enfermé là-dedans.

Y a-t-il une pression de l’entourage professionnel à ce sujet ?
Pas du tout. Ma famille m’a dit de ne pas faire ça. Mais c’est surtout moi qui n’ai pas envie de faire que cela. Et, en même temps, je m’en fous. Ca dépend des scénarios que je reçois. Après Crustacés et Coquillages, je n’ai reçu que des rôles de ce type. Et en plus ce n’était que des rôles supertrash, où je devais jouer à moitié à poil. Dans ces cas-là, je dis non à tout.

Comment vous définiriez-vous ?
Je ne me définis pas. Avec le temps, ça viendra. Mais pour l’instant, je dis juste que je suis jeune. Je ne sais pas quoi ajouter. Je pense qu’il y a autant de sexualités que de personnes. Et comme je ne sais pas encore quelle personne je suis, on verra.

Quels sont vos projets ?
J’ai tourné un film avec Jacques Gamblin qui sortira en février. Et j’ai tourné tout l’été la prochaine saison de Madame Le Proviseur. J’ai interprété le rôle d’un garçon du XVIe arrondissement très macho et très homophobe. C’était très drôle à faire. Un jour, je répétais la pièce, et un autre jour la série, je ne savais plus où j’en étais. C’était très marrant. Sinon, je fais partie de la compagnie Roger Louret et nous faisons des spectacles très régulièrement un peu partout en France.

TETU (novembre 2005)