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Chantons dans le placard, selon Michel Heim

Au temps où on se mariait encore, dans les « bonnes familles », il se trouvait toujours un bambin candide pour demander : « Bonne-Maman, pourquoi Oncle Henry (Raymond ou Marcel) n’est pas marié ? » L’aimable aîeule arborait un sourire crispé, se raclait discrètement la gorge, et répondait : « Il n’aime pas les dames » Et de passer vite vite à autre chose. Ô Montherlant, Radiguet, Proust et autres ‘invertis’, vos œuvres étaient alors décrétées profondément nocives du fait de vos mœurs, avouées ou pas. Pour désigner les homosexuels déclarés et pratiquants, les anglo-saxons ont inventé le mot gay, soit good as you. Cher Denis D’Arcangelo, c’est de votre faute si on est gagné par la tentation d’une certaine pédagogie. Vous nous donnez envie de ré-envisager ce qui a marqué des générations, et que vous ressuscitez, de façon si juste, grâce à ces chansons entêtantes que nous fredonnions sans arrière pensée, et dont nous n’avions pas envisagé qu’elles avaient des double-fonds . Ce spectacle en deux temps se donne dans un merveilleux ex dancing, face à la plus vieille maison répertoriée à Paris, rue Volta.

Sa trame est plutôt un prétexte. Jugez-en : un jeune chanteur auditionnant pour une comédie musicale doit présenter une chanson ‘gay’. Il s’adresse à un maître, soit vous, Denis, qui lui fait réviser, revisiter le déchirant Aznavour de « Comme ils disent », la Barbara de « Qui est qui », Trénet et son « Abbé à l’harmonium », et aussi Anne Sylvestre, Suzy Solidor, Régine. Plus explicite encore, cet « Il en est » (de la pédale, de la jaquette flottante, comme on disait alors, ô florilège !) selon Fernandel. Soit une petite trentaine de chansons chantées par maître et élève, adroitement accompagnés au piano. Bien joué ! Patrick Laviosa et Benoît Romain, respectivement comédiens, compositeurs, chanteurs ou danseurs et interprétes, se sentent chez eux et à l’aise dans ce spectacle. Ecrit par Michel Heim, mis en scène par Christophe et Stéphane Botti.

(Tango, 11 rue au maire, Paris 3°) mar- mer- jeu- 20h.30 jusqu’au 27 avril.
 

Marie Ordinis